La diversité des fonctions urbaines (économique, politique, résidentielle et culturelle) figure parmi les objectifs du code de l’urbanisme.
Elle s’oppose à l’urbanisme fonctionnaliste, pensé dans une logique de zoning avec des quartiers monofonctionnels, initialement pour éloigner les activités sources de nuisances des centres des villes et lutter contre la congestion urbaine.
Si celui-ci a longtemps guidé la conception des espaces urbains, il est depuis plusieurs décennies remis en cause au profit de la mixité fonctionnelle, et depuis quelques années par la notion de diversité fonctionnelle.
A rebours des politiques de zoning qui découpèrent le territoire en zones fonctionnellement différenciées, promues par la planification urbaine de l’après-guerre et le développement de la civilisation automobile, l’injonction à la mixité fonctionnelle, à la mixité urbaine, à la mixité des usages, est présente depuis au moins trois décennies. Elle est devenue un objectif majeur des politiques urbaines, depuis la LOV de 1991 jusqu’à l’appel à projets d’écoquartiers.
Elle figure comme un contre-modèle urbanistique, ou un modèle correctif des conséquences de l’urbanisme fonctionnaliste : ségrégation économique et sociale, congestion.
L’objectif de mixité fonctionnelle est par exemple, dans un quartier ou dans une zone donnée, de rapprocher les différentes fonctions des habitants de façon que celles utilisées le plus fréquemment (commerce, services, production, loisirs…) soient accessibles à pied ou à vélo à partir de la plupart des habitations. Ainsi, une « ville verte », une « ville des courtes distances » est favorisée par les transports en commun et les mobilités douces, pour un développement urbain durable.
La diversité fonctionnelle étend ce concept en l’élargissant spatialement à la définition de choix et de lignes directrices guidant la transformation urbaine. Le projet urbanistique de « diversité fonctionnelle » est appelé à programmer la reconversion fonctionnelle de larges parties de ville, précédemment occupées par des fonctions de production ou des infrastructures logistiques qui supportaient l’industrie, pour certaines obsolètes comme les friches.
Dans ce sens, les processus d’abandon ou de relocalisation d’activités de production ou de structures logistiques ont été accompagnés de processus de valorisation des ressources immobilières générées et des projets de transformation et de réinvestissement, de re-création de valeurs, matérielles et immatérielles (liens sociaux), sous-tendues par un système de mobilités performant.
Le paradigme de la mixité fonctionnelle a été revisité sous le prisme de l’écologie urbaine. Il n’est pas anodin que le terme « diversité fonctionnelle », emprunté comme d’autres (cf. « régénération », « bioéconomie », « cycle de vie », ou encore « écosystème »), au champ lexical de la biologie, capte ses facultés d’adaptation, d’équilibre et de variété des réponses pour faire face aux changements plus ou moins brutaux, comme peut l’être le réchauffement climatique.
L’hybridation des espaces et des activités qui en résulte peut prendre plusieurs formes :
- La mutation d’un espace économique monofonctionnel vers un quartier mixte avec développement de la construction de logements, renouvellement / densification des fonctions économiques ;
- L’installation d’activités économiques notamment productives / tertiaires en coeur de ville, au plus près des habitants, des services, des équipements… créant ainsi des synergies bénéfiques pour les projets urbains ;
- Le maintien d’activités industrielles et logistiques souvent historiques, en proximité des villes dont le renouvellement urbain nécessite un travail fin de couture et de cohabitation de fonctions nouvelles (récréatives, urbaines) avec ces fonctions économiques traditionnelles.
Outre le brassage des générations et des catégories sociales, sont promues la qualité de vie des habitants et la réponse aux enjeux environnementaux par la limitation dans la diversité fonctionnelle, les déplacements alternatifs à la voiture, la préservation d’espaces et patrimoines naturels, proches et accessibles.
Ainsi, la diversification des fonctions de la ville dépasse la traditionnelle articulation travailler-habiter pour embrasser les autres questions, notamment les nouvelles formes de production, de mobilité, d’habitat, de rapport à la nature.
A ce titre, le discours sur la diversité fonctionnelle pourrait être un moyen de retrouver à un siècle de distance, à travers des espaces de vie et de travail à échelle humaine, variés et adaptables, la mixité historique des réseaux d’habitations et de petits locaux d’activités qui faisaient jusque dans la première moitié du 20e siècle, l’identité et l’attractivité des quartiers de faubourg.
La mission confiée par la DREAL au Réseau 7EST concentre l’essentiel de l’analyse sur la diversité fonctionnelle en zones d’activités.
Son objectif stratégique est d’identifier de façon opérationnelle :
- Les facteurs (liens, échelles) qui concourent à organiser la diversité fonctionnelle dans les sites dédiés à l’économie,
- Les freins et leviers dans la recherche de cette diversité, en distinguant deux phénomènes :
- La juxtaposition : des sites d’activités aménagés selon une logique fonctionnaliste depuis les années 1960 ont évolué pour être rattrapés à leurs marges par l’urbanisation ; la problématique majeure est celle du rapport entre les différentes échelles.
- La régénération : les mutations internes aux sites d’activités, planifiées ou non régulées, ont souvent introduit des fonctions servicielles aux entreprises, aux salariés et aux usagers ; la problématique majeure est de comprendre comment la diversité fonctionnelle a instauré une polyvalence des usages dans le but d’améliorer la qualité de vie de ses usagers.
Le rapport d’étude sur la diversité fonctionnelle est articulé en trois séquences :
- La première partie analyse les objectifs des acteurs et le processus de fabrication de la diversité/mixité fonctionnelle ;
- La deuxième partie examine les freins et leviers ;
- La troisième partie en dégage les enseignements et les pistes pour l’action publique et pour de nouveaux modèles urbains.
Il s’appuie sur 6 cas d’étude concrets dans le Grand Est (fiches-projets en fin de document) :
- Boucicaut à Tinqueux dans le Grand Reims ;
- Garennes Bastié Saint-Ladre à Marly dans la métropole de Metz ;
- Nancy Porte Sud à Houdemont, Heillecourt et Fléville-lès-Nancy dans le Grand Nancy ;
- Le Parc International d’Activité des Trois Frontières dans le Nord Lorraine ;
- La Plaine des Bouchers à Strasbourg ;
- La Route de Soultz à Wittenheim-Kingersheim dans l’agglomération de Mulhouse.